L’économie régénérative : qu’est-ce que c’est ?

Points de vue
Régénération

La science nous alerte. La crise écologique est systémique : changement climatique, effondrement de la biodiversité, épuisement des ressources, perte de sens au travail, pour ne citer que quelques enjeux. La réponse à apporter ne peut être qu’ambitieuse. L’économie régénérative est une méthode à suivre pour les entreprises et les territoires. En mettant au cœur de son action la vie sous toutes ses formes, elle ouvre une voie inspirante et praticable : la régénération.

  1. prendre en compte les services écosystémiques
  2. une boussole et 4 points cardinaux : climat, biodiversité, ressources et humains
  3. sobriété, le maître-mot de la régénération
  4. de la croissance à la prospérité

Nous nous engageons dans une mutation écologique et humaine de grande ampleur, jamais envisagée par aucune civilisation. Tous les acteurs de la société sont concernés. Et ce, en commençant par les acteurs économiques et politiques : les entreprises, les organisations, les territoires. Mais il nous manque un plan d’ensemble.

La base : les services écosystémiques

Fondée sur des travaux académiques, empiriques, mais aussi sur des expériences d’entreprises et de territoires, l’économie régénérative est à la fois une philosophie et une méthode pratique pour les organisations et les territoires en quête de résilience. C’est une autre manière de créer, entreprendre et vivre sur un territoire.

Concrètement, l’économie régénérative considère que les ressources naturelles et leur fantastique capacité à se régénérer, constituent le socle de la vie sur Terre. Elles sont par conséquent, la base de notre organisation en société. Sans nature, pas de civilisation. Sans civilisation, pas d’activité économique. Pas d’entreprise non plus. S’il n’y a pas de revendeur Apple sur Mars, c’est parce la vie n’y a pas sa place. Pas telle que nous la connaissons en tout cas.

Toute entreprise, tout territoire, dépend donc pour sa prospérité, de ce « socle naturel » – on l’appelle aussi capital naturel – et des services qu’il produit gratuitement. On appelle ces derniers les services écosystémiques.

Ressources renouvelables et non renouvelables

Certains de ces services s’appuient sur des ressources renouvelables : l’eau que nous buvons, l’air que nous respirons, le bois de nos constructions, la pollinisation de nos aliments, les plantes de nos traitements. L’if à baies (ou if commun) est ainsi riche en molécules utilisées dans les traitements contre les cancers du sein, des poumons, de la prostate.

Une partie des services écosystémiques dépendent de ressources renouvelables à des échelles de temps relativement brèves. En fonction des techniques agricoles, de la qualité du sol et du climat, on peut ainsi récolter des brocolis une à plusieurs fois dans l’année.

D’autres services dépendent de ressources théoriquement renouvelables, mais à des échelles de temps géologiques, ce qui en fait des ressources non renouvelables à l’échelle du temps humain. On les trouve notamment dans le sous-sol : par exemple, le pétrole et les minerais qui nous permettent de produire quantité de bidules et de machins jetables, en plastique ou truffés d’électronique, et plus encore.

125 000 milliards de dollars par an, c’est 1,5 fois le PIB mondial

Amateurs de grand air, randonner en montagne ou s’ébrouer en bord de mer fait aussi appel aux services rendus par la nature. L’économie du tourisme en dépend fortement. Souvenez-vous : en décembre 1999, l’Erika sombre au large des côtes bretonnes. La marée noire souille une partie de celles-ci. On comprend aisément qu’il y a une dégradation du capital naturel, donc de sa capacité à produire des services écosystémiques. Les territoires et entreprises qui en dépendent l’ont ressenti instantanément. En résumé, qu’il s’agisse de services matériels, immatériels ou de services de régulation (l’eau, l’air, etc.), la sensibilité de l’économie aux services écosystémiques est totale.

L’économiste Robert Costanza a travaillé sur le sujet. Dans une étude fondatrice, il estime le potentiel de services écosystémiques rendus par la Terre à 125 000 milliards de dollars chaque année, au bas mot. C’est 1,5 fois la valeur du PIB mondial. En clair, nous avons besoin d’1,5 € de nature pour produire 1 € de PIB. Ou encore, une entreprise qui produit 1 € de valeur ajoutée a besoin pour cela d’1,5 € de nature.

Les choses s’éclairent : il n’y a pas d’économie sans services écosystémiques et pour que la nature nous rende ces services, leur potentiel (lié à l’état du capital naturel) doit être préservé. Malheureusement, les atteintes à l’environnement (climat, biodiversité, pollutions…) dégradent année après année ce potentiel. En jouant avec, voire en franchissant allègrement les limites physiques, chimiques et biologiques planétaires, nous n’avons pas « juste » dégradé un paysage. Non : notre civilisation et nos activités économiques dégradent le capital naturel et, par conséquent, réduisent le potentiel de services écosystémiques. Nous avançons, aveugles, sur une pente glissante.

Évolution : un travail patient

C’est d’autant plus regrettable que ce capital naturel, s’est formé par la dynamique de l’évolution chère à Darwin, au fil de centaines et centaines de millions d’années. C’est le fruit d’un long travail, extrêmement « patient ». Nous le dilapidons malheureusement à grande vitesse, grâce et à cause de notre grande intelligence qui nous a permis en quelques siècles de concevoir des moyens techniques faramineux, en recourant à la puissance énergétiques des fossiles, et notamment du pétrole. Le charbon, le gaz, le pétrole et toutes les matériels et infrastructures qu’ils font tourner au service d’une économie qui reste dégénérative. Nous sommes entrés dans l’anthropocène, époque où l’être humain devient une force géologique.

La Terre s’est formée il y a 4,6 milliards d’années. La vie y est apparue il y a 3,8 milliards d’années. L’évolution des espèces a donné naissance aux arbres, aux grands singes, aux pollinisateurs, aux hominidés… Si cette évolution était ramenée à une année civile, chaque jour compterait pour 12,6 millions d’années. Homo Sapiens serait apparu le 31 décembre vers 23h34. Il aurait inventé l’agriculture à 23h58. La révolution industrielle (et fossile) aurait pris son essor à 23h59 et 58 secondes. Le climat aurait commencé à se dérégler et la biodiversité à s’effondrer 2 secondes plus tard. 2 petites secondes pour détruire le « travail » d’une année… – Crédit Open Lande

Une boussole, 4 points cardinaux pour se repérer, 6 piliers pour agir

Que pouvons-nous faire ? L’équation est simple dans sa compréhension, complexe dans sa résolution : nous pouvons passer d’une économie qui détruit – dite dégénérative – à une économie qui répare, dite régénérative. Pour schématiser, il y a, d’une part, notre souhait de répondre aux besoins humains : accès à l’eau, à une alimentation saine, à l’éducation, aux loisirs. On ne parle même pas des 2 smartphones, du nouveau SUV et des fruits exotiques à 1€ le kilo… Pour répondre à ces besoins, notre économie sur-exploite le capital naturel. Cette surexploitation dégrade en retour la capacité de la nature à produire les services écosystémiques, sans lesquels notre économie ne pourra, à terme, plus fonctionner. Elle sera évidemment incapable de répondre aux besoins humains superflus, et plus grave, aux besoins essentiels. Cercle vicieux.

Pour sortir de l’impasse, notre défi consiste à replacer illico presto l’économie à l’intérieur des limites planétaires, pour préserver le capital naturel, voire le restaurer (n’anticipons pas). Précisément, 9 limites planétaires ont été identifiées en 2009 par le Stockholm Resilience Centre, sous la direction de Johan Rosktröm. 6 d’entre elles sont déjà dépassées, dont celles du climat et de la biodiversité. Ces dépassements ont tous la même origine : l’activité économique humaine, source de pollutions, dégradation des sols, surexploitation des espèces, surconsommation d’énergies fossiles, etc.

Un développement humain juste et sûr

Pour assurer un développement humain « juste et sûr », des penseurs comme Kate Raworth ont dessiné ce qui pourrait être le nouveau terrain de jeu de l’économie. Ainsi, selon la théorie du beignet (ou du donut), les acteurs économiques et politiques doivent (re)penser leur développement dans un espace borné, d’une part par les besoins humains essentiels et d’autre part, par les limites planétaires. Cet espace peut se dessiner sous la forme d’un beignet, qui a donc donné son nom à cette théorie. Des villes comme Amsterdam développent des projets de territoire sur la base des travaux de Kate Raworth.

L’économie régénérative s’inscrit dans cette logique. Elle y ajoute un point essentiel : nous pouvons passer de l’exploitation de toutes les formes de vie, qui signe la caractéristique de notre économie extractive, à une coopération avec toutes les formes de vie, à commencer par la vie humaine. Cette vision est promue par des personnalités comme l’entrepreneur et écologiste Paul Hawken.

Miser sur le capital naturel : un investissement et non un coût

Elle fait le pari que la préservation du vivant sous toutes ses formes constitue non pas un coût, mais un investissement. Et que cet investissement se traduit tôt ou tard par un ensemble de richesses matérielles et immatérielles. Le capital naturel serait donc à l’image d’une infrastructure très coûteuse et très complexe. Cette « infrastructure naturelle » aurait été conçue au fil du temps et nous en hériterions. Nous consacrerions un soin infini à l’entretenir, car elle nous permet de produire des services sans lesquels nos sociétés humaines se disloqueraient.

L’économie régénérative va même plus loin. Elle considère que nous pouvons reconstituer le capital naturel, puis le renforcer via nos activités économiques, à certaines conditions : il s’agit de tenter d’aligner l’activité humaine avec l’objectif de reconstitution du capital naturel ! Revenons à l’exemple de l’agriculture. L’état initial est un modèle dégénérescent, qui détruit progressivement les haies, les sols et empoisonne l’eau. Ce « modèle » apporte certes une grande quantité de biens, mais il nuit à la santé humaine et ne permet pas toujours aux agriculteurs de vivre décemment de leur travail.

Restauration du capital naturel

Or, on peut basculer dans un autre modèle, agroécologique. On passe alors à un système qui entretient le potentiel des sols à se régénérer, qui offre aux insectes et aux animaux la possibilité de pulluler et d’interagir avec leur milieu. Ce dernier retrouve ses fonctions écologiques initiales : il absorbe du CO2 et permet de lutter contre le changement climatique. À la clé, des cultures abondantes, une activité économique stabilisée pour les agriculteurs, des emplois dans la transformation et la distribution alimentaires.

En « réparant la Terre », l’économie régénérative ouvre la voie d’un capital naturel restauré. Dans ce modèle, on cesse de porter atteinte au climat, voire, on crée de nouveaux puits de carbone. On cesse de porter atteinte à la biodiversité, voire on permet aux écosystèmes de se régénérer. C’est ainsi que le Costa Rica a reconstitué ses forêts dans des proportions inouïes, sans remettre en cause son économie, bien au contraire. Enfin, on préserve les ressources voire, pour certaines comme l’eau, on leur permet de retrouver leurs qualités initiales.

Quelle(s) valeur(s) créer ? Comment les répartir ?

Climat, biodiversité, ressources, humain. L’économie régénérative place en son cœur la préservation et la régénération du capital naturel et humain. Nous affirmons même qu’elle pose le sujet de l’éthique du leadership : replacer le vivant et sa préservation au cœur de la décision (publique ou privée) est un projet à encourager fortement. Il y a là, une dimension profondément culturelle, un changement de paradigme à provoquer. Pour atteindre de tels objectifs, cette approche nécessite de remettre la science – la connaissance – au cœur de nos projets économiques, que ces projets soient portés par des entreprises, des territoires ou des personnes (par exemple un projet entrepreneurial).

Point central, elle nécessite également de redonner au projet humain toute sa place. Quel est le sens de notre travail ? Quelles sont les conditions de travail sur l’ensemble de la chaîne de valeur d’un produit ou d’un service ? Cette économie n’est compatible, ni avec l’exploitation des ressources naturelles, ni avec celle des humains. Inversement, elle appelle à prendre soin de tous les vivants, qu’ils soient humains ou non. Prendre soin pour maintenir les potentialités naturelles et humaines. Prendre soin, également, de répartir au plus juste les fruits qu’offrent ces potentialités. La juste répartition de la valeur est donc au cœur de l’économie régénérative.

En résumé, l’économie régénérative va donc :

  • chercher à répondre aux besoins humains prioritaires
  • se situer volontairement à l’intérieur des limites planétaires
  • viser la restauration du capital naturel en coopérant avec le vivant

Croissance ou prospérité ?

Deux questions à ce stade.

Première question, faut-il tuer l’économie ?

Non, bien entendu. Dans « économie régénérative », il y a bien, justement, le terme économie. L’idée n’est pas de penser la nature contre l’économie, mais de repenser une économie qui coopère avec la nature (le vivant), plutôt que poursuivre sur la voie de la surexploitation. L’économie désigne d’ailleurs la gestion de la maison, quand l’écologie désigne la connaissance de la maison. Mieux connaitre le vivant nous permettra sans nul doute d’inventer une meilleure manière de gérer notre maison.

Deuxième question, replacer l’économie dans les frontières planétaires ne revient-il pas à parler de décroissance ?

Aussi passionnant soit-il, ce débat ne nous semble pas pertinent à ce stade. Pas besoin d’être grands clercs pour comprendre, voire pour désirer, la décroissance de certaines activités comme celles liés aux énergies fossiles (gaz, pétrole, charbon). Le Pacte de Glasgow sur le climat a constitué, récemment, une (petite) avancée dans cette direction. Appelons un chat, un chat : ici, il s’agit de décroître et de faire disparaître les emplois qui vont avec.

Des métiers disparaissent, d’autres muent, d’autres encore apparaissent

Du fait de l’effacement souhaitable des énergies fossiles, il nous faudra trouver des alternatives peu carbonées : énergies renouvelables et nucléaire constituent des voies sérieuses, ce qui n’empêche pas d’en débattre. La question de leur capacité à fournir suffisamment d’énergie pour se substituer au gaz, pétrole et charbon, reste cependant entière. C’est pour cela que la sobriété énergétique est une priorité absolue.

Cette sobriété en toutes choses, est en fait un pilier de nos sociétés à venir, sur lequel nous pouvons concevoir de nouvelles manières de produire et consommer. Là, se situe le mainstream des années à venir. Des objets techniques simplifiés, c’est moderne. De nouveaux circuits économiques, raccourcis et peu consommateurs de ressources, c’est moderne. Des produits à durée de vie extrêmement allongée et « infiniment » réparables, c’est moderne.

Sobriété, le maître-mot de la régénération

Puisqu’il faut ramener l’économie dans les limites planétaires, apprenons à voir les choses différemment. Prendre soin du capital naturel et utiliser avec précaution ce qu’il offre devient, ainsi, la norme. Elle est d’ailleurs une règle du fonctionnement de la nature, toujours parcimonieuse avec elle-même :

  • elle ne produit pas de déchets, juste des ressources, organisées dans des systèmes complexes et adaptés aux conditions et à la temporalité de leurs milieux,
  • la nature est économe en éléments et en énergie. Comme le souligne Serge Berthier (1), « plus de 96% de la matière vivante est issue de l’assemblage, en une infinité de molécules, de (…) six atomes : carbone (C), hydrogène (H), azote (N), oxygène (O), phosphore (P) et soufre (S) ». Cela ne l’empêche pas d’être, dans son ensemble, puissante et foisonnante.

Indicateurs de prospérité

En résumé, renouvelables, nucléaire (ou pas), sobriété, mais aussi agroécologie et filières biosourcées… Ici, il s’agit bien de croître et de faire croître les emplois qui vont avec ces activités « nouvelles ».

La croissance de ses activités nouvelles suffira-t-elle à compenser la décroissance des activités incompatibles avec les limites planétaires ? Nous avons deux voies possibles. En nous engageant sur la première, on considère que rester scotchés au PIB est plus important que tout. Quitte à dézinguer la Terre… ce qui devrait anéantir l’économie et le PIB lui aussi. Avec une logique aussi simple – et simpliste – nous n’irons pas loin.

L’autre voie, ambitieuse il est vrai, consiste à repenser les termes de la prospérité. Cette voie ouvre la possibilité de mesurer l’épanouissement d’une civilisation à l’aune d’autres indicateurs, tels que la santé, le bien-être, l’accès aux services de base, la culture, notre capacité à entreprendre dans les limites planétaires, etc…

Des métiers pour générer du Like, d’autres pour régénérer le capital naturel

Dès lors, le champ des possibles est ouvert. Chose amusante, penser ces nouveaux indicateurs, les tester, peut en soi devenir un nouveau métier, ou nécessiter le verdissement d’un métier ancien et parfois dépassé : le métier d’économiste. L’image est intéressante car, en réalité, ce sont ainsi tous nos emplois qui vont devoir muer ou disparaître, tandis que de nouveaux emplois apparaîtront.

C’est une des perspectives de l’économie régénérative : son potentiel de création d’emplois et de métiers chargés de sens. Quand on y réfléchit un instant, travailler pour cette économie-là peut faire autant rêver les jeunes générations que travailler pour les univers parallèles que Facebook, et d’autres, nous présentent comme seul avenir. De fait, l’économie régénérative aura besoin d’outils numériques et des talents qui vont avec. Générer du Like sur des vidéos de chats ou régénérer le capital naturel : à quoi serviront ces talents ?

Nouveaux modèles économiques

Revenons à nos moutons. Soit nous considérons qu’il n’y a pas d’autre manière de faire de l’économie, et alors, c’est la décroissance assurée tôt ou tard. Soit nous cherchons à repenser cette économie sur un nouveau terrain de jeu borné d’une part par les frontières planétaires et d’autre part par les besoins humains. La théorie du beignet (Dougnhut) proposée par Kate Raworth est une des approches pour proposer de nouvelles méthodes de production et de consommation.

Son principal mérite est d’identifier et de traiter les fragilités d’une organisation ou d’un territoire, en s’appuyant sur les potentiels de développement de nouveaux modes de production et en repensant les modèles économiques qui vont avec. L’économie régénérative met également au cœur de son design, la notion de juste répartition de la valeur. Abondant, le capital naturel n’est pas disponible de manière illimitée. Son maintien, sa mise en commun et l’accès de toutes et tous aux services qu’il assure doivent être pensés et organisés.

Régénérer, c’est aussi savoir renoncer

Ainsi, basculer une exploitation agricole conventionnelle en agroécologie permet tout à la fois de régénérer les sols, d’absorber du CO2, de créer des emplois en répondant aux besoins humains essentiels. Le projet Greenpods s’inscrit dans cette lignée, en Occitanie. Cela nécessite toutefois de renoncer à certains types de cultures (trop gourmandes en eau) ou d’élevage (intensif), mais aussi de raccourcir les circuits de distribution. Cette méthode peut s’appliquer à l’urbanisme et à la construction. Pas simple : il faut y mettre de la méthode, des ressources, du temps.

Demain, on peut imaginer qu’elle s’applique à des procédés industriels et aux services. Au Danemark, on peut citer un projet d’écoquartier designé comme une forêt. Ni fanfare, ni trompette, cependant. Ici l’humilité est de mise : cette approche, comme d’autres, est en construction.

L’économie régénérative n’est pas un chèque en blanc qui permettrait de s’affranchir des frontières planétaires, pas plus qu’elle n’apporte de solution toute faite au changement climatique, ce dernier étant quoiqu’il en soit un phénomène parti pour durer.

En résumé : que propose l’économie régénérative ?

Cette économie part de ce qui nous anime : la vie, sous toutes ses formes. Celle-ci a pour écrin la zone critique.

En pratique, voici ce que l’on peut démarrer :

  • mise en place d’une stratégie bas carbone avec des points de passage permettant de se situer sur la trajectoire de l’Accord de Paris. À terme, c’est une réduction d’au moins 80% des impacts
  • mise en place d’une stratégie biodiversité, permettant d’analyser les impacts et dépendances de la chaîne de valeur, de réduire rapidement les impacts négatifs et d’aligner progressivement le modèle d’affaires sur la restauration, voire la régénération des écosystèmes
  • circularisation forte des ressources (gare à l’effet rebond)
  • questionnement sur la manière de créer, faire circuler et répartir la valeur sur l’ensemble de la chaîne de l’organisation ou du territoire, en intégrant la question sensible des droits humains
  • dialogue de parties prenantes au cœur d’une instance si possible statutaire
  • instauration de coopérations (de filière, de territoire)
  • identification des communs dont l’organisation ou le territoire dépend et participation à leur restauration / entretien / bonne gestion par les acteurs économiques
  • souties à des projets de régénération
  • circulation de l’information et de la connaissance dans des modèles ouverts (open source), pour fluidifier la duplication des succès et leur passage rapide à l’échelle…
  • …ce qui permet de bénéficier en retour de la connaissance et des retours d’expérience produits par l’écosystème

L'économie régénérative : qu'est-ce que c'est - Les 6 piliers d'une économie régénérative - Crédit Open Lande

La « Regeneration Punch List » de Paul Hawken

Mon activité est-elle extractive ou régénérative ? Voici quelques questions simples et franches pour se mettre en route. Elles sont posées par Paul Hawken, entrepreneur et scientifique multi-caquettes, l’une des figures internationales de la régénération.

  • Mon entreprise crée-t-elle plus de vie ou la réduit-elle ? 
  • Guérit-elle l’avenir ou le vole-t-elle ? 
  • Améliore-t-elle le bien-être humain ou le diminue-t-elle ? 
  • Prévient-elle la maladie ou en tire-t-elle profit ? 
  • Crée-t-elle des moyens de subsistance ou les élimine-t-elle ?
  • Restaure-t-elle les terres ou les dégrade-t-elle ? 
  • Augmente-t-elle le réchauffement de la planète ou le réduit-elle ? 
  • Est-ce qu’elle répond aux besoins humains ou fabrique des désirs humains ? 
  • Réduit-elle la pauvreté ou l’étend-elle ? 
  • Favorise-t-elle les droits fondamentaux de l’homme ou les dénie-t-elle ? 
  • Offre-t-elle de la dignité aux travailleurs ou les rabaisse-t-elle ? 
  • En bref, mon activité est-elle extractive ou régénérative ?

Par Paul Hawken,

entrepreneur et auteur de Regeneration


À lire également : le Manifeste de l’économie régénérative d’Open Lande

(1) À lire dans l’excellent Humanité bio-inspirée, une autre approche. Ed. Cherche-midi, sous la direction de Gauthier Chapelle et Kalina Raskin.

(2) Voir la Zone critique https://fr.wikipedia.org/wiki/Zone_critique_(sciences_de_la_Terre)

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