Dossier : la décarbonation dans l’agroalimentaire 

Avec 23% de l’empreinte carbone des Français, l’alimentation constitue le deuxième poste d’émissions après les transports.

Si la production agricole concentre l’essentiel des émissions, les activités de transformation, transport et distribution ont aussi un rôle clé à jouer.

Pour les acteurs de la filière, plusieurs leviers d’action sont envisageables, du champ à l’assiette.

Des dispositifs d’accompagnement existent.

Les enjeux climatiques

Les enjeux climatiques posent de sérieux défis à la filière agroalimentaire.

Elle doit faire face à une augmentation des événements climatiques extrêmes, tels que les inondations, les sécheresses, les averses de grêle et les tempêtes, ainsi qu’à des glissements de terrain.

La disponibilité incertaine en eau exacerbe les conflits pour les ressources hydriques, tandis que la réduction de la biodiversité affaiblit la résilience des écosystèmes agricoles.

De nouveaux ravageurs et bactéries, jusqu’ici inconnus, émergeront, compliquant davantage la situation.

(1) Source : Citepa, ABC et ADEME

Les émissions de gaz à effet de serre du secteur

Selon O2M, en moyenne, dans le monde de l’industrie agroalimentaire, les ordres de grandeur de l’impact CO2 sont les suivants :

  • 65% de l’empreinte provient des matières premières agricoles et de leurs déchets. Dans le lait ou le porc, on atteint même 80 à 85 %. Dans le cas d’une production végétale à faible impact, cela peut descendre à 40 %.
  • 20% provient de l’énergie, de l’emballage et des process.

  • 10%, du transport et de la distribution.

  • 5%, de la fin de vie des produits.

Contexte et enjeux économiques

En France, on dénombre 16 000 acteurs économiques œuvrant dans la production alimentaire. Une majorité d’entre eux sont des structures de petite et moyenne envergure.

Avec ses 430 000 personnes employées, ce secteur d’activité représente le premier employeur manufacturier sur le territoire national. Il a donc un poids important et un rôle prépondérant à jouer pour diminuer l’impact environnemental global lié à l’alimentation des populations.

Ces entités sont confrontées à de multiples problématiques d’ordre social, sociétal et écologique.

Contexte réglementaire :  au niveau européen, le Green Deal et le paquet Fit for 55 visent une réduction de 55% des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 par rapport à 1990, pour mettre l’UE sur les rails de la neutralité carbone en 2050. Et ce, conformément à l’Accord de Paris de 2015. Au niveau français, la Stratégie Nationale Bas Carbone, dont le troisième volet est en cours d’élaboration, cible l’alignement sur la trajectoire européenne, et au minimum – 40% d’émissions en 2030 par rapport à 1990. Elle prévoit également des objectifs de réduction de l’empreinte biodiversité, et de restauration de celle-ci. De son côté, la loi Climat et Résilience impose aux filières, dont l’agroalimentaire, des feuilles de route de décarbonation.

Attentes de la société et des consommateurs : leurs  choix en termes d’alimentation ont évolué de manière significative pour leur santé, leur bien-être, et l’impact de leurs choix alimentaires sur l’environnement et la société. D’après un sondage IFOP, 62% des Français sont prêts à changer de mode d’alimentation et de vie pour répondre à l’urgence du changement climatique.

Labels  : ils mettent en avant des produits ou des exploitations pour guider les consommateurs dans leurs choix et promouvoir des méthodes de production plus écologiques. En plus des émissions de gaz à effet de serre (GES),  ils prennent parfois en compte d’autres critères, tels que la protection des écosystèmes. La diversité et leurs différents degrés d’exigence et de fiabilité ont entraîné la création d’un système de notation national et d’affichage sur les produits.

Futur affichage environnemental :  la loi Climat prévoit  un affichage environnemental qui devra informer les consommateurs sur l’empreinte écologique des produits alimentaires.

Prix de l’énergie : les fluctuations récentes des marchés énergétiques, exacerbées par les tensions géopolitiques, ont entraîné une envolée des coûts de l’électricité, des carburants fossiles et du gaz naturel en 2022.  Face à l’augmentation du prix et de la fiscalité appliquée aux énergies carbonées, réduire et changer sa consommation d’énergie est déjà nécessaire.

Attractivité des métiers : outre leur activité principale, les entreprises doivent réfléchir à créer un environnement de travail agréable et motivant pour recruter.

L’entreprise alimentaire décarbonée et régénérative

Dans ce contexte, l’agriculture décarbonée et régénérative émerge non seulement comme une nécessité mais comme une stratégie vitale pour la survie de nos écosystèmes et le bien-être des générations futures.

Cette approche, axée conjointement sur la réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre, sur des modèles plus circulaires et sur la préservation et la régénération des écosystèmes, exige une transformation profonde des pratiques agricoles et alimentaires.

Elle vise à minimiser l’empreinte carbone du secteur, revitaliser la biodiversité, améliorer la santé des sols, et encourager un changement significatif dans les habitudes de consommation… tout en nourrissant la population sainement et à un prix abordable.

L’implication de tous les acteurs de la chaîne de valeur agroalimentaire, de l’exploitant agricole au consommateur, devient donc cruciale​.

La trajectoire vers des pratiques agricoles décarbonées et régénératives est jalonnée de défis. Il y a notamment le besoin d’innovation dans les pratiques et technologies, mais aussi de financements adaptés, de formation et d’éducation, ainsi que le développement de marchés pour les produits issus de ces pratiques.

Face à ces obstacles, des stratégies telles que :

  • le soutien à l’agroécologie,
  • l’incitation financière pour les pratiques durables,
  • et la promotion de la consommation responsable,

se révèlent indispensables.

Le  mise en œuvre de ces stratégies requiert une coopération étroite entre les entreprises, les gouvernements, et les organisations non gouvernementales, pour faciliter le partage des connaissances, des ressources, et pour promouvoir les succès à travers des initiatives concrètes et mesurables​.

L’engagement dans cette voie n’est pas seulement une réponse à une exigence éthique et environnementale mais répond aussi à l’enjeu de résilience de nos systèmes alimentaires et de nos territoires face aux défis de demain.

agriculture régénérative

Comment fait-on ? Les leviers d’action

En amont de la chaîne d’approvisionnement, plusieurs pistes s’offrent aux acteurs du secteur :

  • Promouvoir des méthodes agricoles durables telles que l’agroécologie, l’agroforesterie et l’agriculture de précision. Ces pratiques permettent de limiter l’utilisation d’engrais chimiques, d’améliorer la qualité des sols et d’augmenter leur capacité à stocker le carbone.
  • Mettre en place une gestion efficace des déchets d’élevage afin de réduire les émissions de protoxyde d’azote dans l’atmosphère.
  • Réorienter la production agricole vers des aliments à faible empreinte carbone, diminuant ainsi les émissions de méthane générées par les ruminants.
  • Développer la bioéconomie, c’est-à-dire exploiter les ressources renouvelables pour produire de l’énergie et des matériaux à moindre impact environnemental.

Au niveau des industries agroalimentaires elles-mêmes, de nombreuses pistes d’action sont envisageables à différents stades :

Approvisionnement : privilégier les circuits d’approvisionnement courts et favoriser les produits issus de l’agriculture durable et respectueuse de l’environnement.

Logistique : optimiser les flux de transport en recourant aux modes les moins polluants pour l’acheminement des marchandises.

Infrastructure : rénover les bâtiments pour améliorer leur performance énergétique et utiliser des matériaux à faible empreinte carbone sur l’ensemble de leur cycle de vie.

Procédés industriels : maximiser l’efficacité énergétique des équipements, s’approvisionner en énergies décarbonées, mettre en place des systèmes de prévention et de gestion optimale des déchets, encourager l’adoption de comportements éco-responsables par le personnel.

Sensibilisation : mener des campagnes de communication et de sensibilisation auprès des consommateurs pour promouvoir des habitudes alimentaires plus saines, durables et anti-gaspillage.

Marchés locaux du carbone : pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050, le GIEC des Pays de la Loire suggère par exemple la création d’un marché local du carbone, incitant les organisations à compenser volontairement leurs émissions de gaz à effet  de serre en acquérant des crédits carbone auprès d’un fonds régional.  Cela valoriserait les actions environnementales, telles que la plantation de haies, offrant des revenus supplémentaires aux agriculteurs.

Les dispositifs d’accompagnement

Diagnostic
C’est le fameux Bilan carbone. Il permet d’évaluer l’empreinte carbone de votre entreprise, d’identifier les principales sources d’émissions et les opportunités de réduction. À la clé, un premier plan d’actions actionnables.

🟡 Pour qui ? TPE, PME, ETI, groupes
🟡 Quel financement possible ? Diag Décarbon’Action de Bpifrance. Pour les entreprises de moins de 500 salariés, un soutien de 4 000 €HT. Open Lande vous aide à constituer le dossier BPI France.

Stratégie climat
Une trajectoire bas-carbone dans une stratégie climat ouvre sur un plan d’action solide et structurant sur le long terme. La méthodologie ACT Pas-à-Pas est une approche reconnue internationalement et portée en France par l’ADEME. Elle permet de définir une trajectoire sérieuse, alignée avec les objectifs sectoriels et les recommandations scientifiques. Elle offre également un cadre aux innovations de l’entreprise.

🟡 Pour qui ? PME+, ETI, groupes dotées d’un premier Bilan carbone
🟡 Quel financement possible ? ACT Pas-à-Pas est pris en charge à hauteur de 50% et jusqu’à 80% (par exemple dans l’industrie) par l’ADEME. Testez votre éligibilité avec l’équipe Open Lande : nous vous accompagnons dans vos démarches.

👇 Vous trouverez également dans le livre blanc de l’action DECARBON’AGRO une liste de tous les accompagnements et initiatives qui sont proposées en Pays de la Loire : installation de systèmes de production d’énergie renouvelable, efficacité énergétique des installations industrielles, conseils et audits énergétiques gratuits ou subventionnés pour identifier les opportunités de réduction de consommation d’énergie, programmes de formation…

L’exemple d’une action collective en Pays de la Loire

En Pays de la Loire, LIGERIAA, l’Association Régionale des Entreprises Alimentaires en Pays de la Loire s’est saisie du sujet.

Portée par LIGERIAA avec le soutien technique et financier de l’ADEME, Bpifrance et la Région des Pays de la Loire et l’expertise d’Open Lande et d’ORACE, l’action DECARBON’AGRO a ainsi embarqué une douzaine d’entreprises agroalimentaires dans un parcours de décarbonation en 2023-2024.

11 entreprises agroalimentaires régionales ont bénéficié d’un accompagnement global ou partiel :

  • Biofournil
  • Brioche Pasquier
  • Caves de la Loire
  • Coopérative Agricole des Producteurs de Noirmoutier
  • Eurial
  • Europe Snacks
  • Le Confiseur de la Mer
  • Pileje Laboratoire
  • Prunier
  • Sadac-Cyranie
  • Vegetal Solutions

Le Livre blanc de DECARBON’AGRO

L’objectif est de sensibiliser, inciter et accompagner les acteurs régionaux de la filière (IAA, amont agricole, fournisseurs d’emballage, transporteurs…) dans la réduction de leur impact carbone, par une approche globale en termes de  :

  • périmètre (scopes 1 à 3)
  • démarche (éviter, réduire, remplacer, compenser/contribuer/régénérer)
  • et croisée filière/territoire (privilégier les acteurs/actions de proximité pour la « compensation/contribution »…).

Ce parcours a fait l’objet d’une soirée publique de restitution et d’un livre blanc détaillant les détails du dispositif et les témoignages des entreprises impliquées.

Version synthèse
Nous vous avons préparé un résumé à l’attention des gens pressés.

Version complète
La version entière du libre blanc sur le site de LIGERIAA.

Télécharger la synthèse

S’abonner à notre newsletter dédiée aux entreprises et aux territoires

Inspirations, cas pratiques, retours d’expérience, lectures, podcasts, événements. Une fois de temps en temps, on vous propose une sélection aux petits oignons.